UN PHOTOGRAPHE DE L'ARCHITECTURE EN PIERRE SÈCHE DE PROVENCE : PIERRE RICOU

A photographer of Provence's dry stone architecture: Pierre Ricou

Christian Lassure

Introduction

Dans les années 1970 et 1980, Pierre Ricou, photographe à Mane dans les Alpes-de-Haute-Provence, a édité au moins une quinzaine de cartes postales photographiques, pour la plupart en noir et blanc, représentant des édifices en pierre sèche (abris, grangeons, cabanons, bergeries) (1) perdus dans les friches de l'époque, voire des détails architecturaux singuliers (linteau, cheminée, arcs-diaphragmes). Au dos de la plupart des illustrations, l'auteur a inséré une citation poétique en rapport avec le sujet photographié.

Ces cartes postales font partie de séries intitulées diversement « Provence à découvrir, « Images de Provence », « Aspects de haute Provence », « Architecture rurale en haute Provence », « Haute Provence à découvrir », la série à laquelle se rattachent le plus grand nombre de cartes étant « Provence à découvrir » (2).

Un demi-siècle plus tard, ces cartes postales continuent à frapper l'esprit par leur caractère insolite. Elles constituent une œuvre esthétique et poétique originale, qui tranche avec les productions commerciales de l'époque (3).

L'inventaire qui suit est un hommage à ce photographe provençal, disparu en 2016 (4).

(1) Se conformant à la terminologie déjà en cours à l'époque dans les milieux non ruraux, Pierre Ricou reprend à son compte le vocable « borie » (« ferme », « métairie ») dans l'acception erronée de « cabane en pierre sèche » : « Bories de Haute-Provence », « Borie ou Cabanon pointu », « Cheminée de borie », « Deux bories », « Borie du Lubéron », « Village des Bories », « Grande borie du Libéron ». Sur cette question terminologique, cf. Christian Lassure, L'invention de bòri (borie) en tant que cabane en pierre sèche, Les Carnets du Ventoux, No 110, hiver 2021, pp. 75-79. 

(2) La production de Pierre Ricou ne s'est pas limitée aux ouvrages en pierre sèche. Au nombre des thèmes ruraux abordés, on trouve le berger conduisant son troupeau, la tonte des moutons, le forgeron au travail, le pressage des olives, le champ de lavande, le champ de blé, les vieux outils agricoles, les vieilles carrioles, les toits villageois, les campaniles en fer forgé, les cadrans solaires, les voûtes en pierre, les sculptures romanes, etc. Pierre Ricou est aussi connu pour avoir illustré de belles photos la monographie de Jean-Marie Homet, Cadrans du soleil, parue aux éditions Jeanne Laffitte en 1999, le livre du romancier provençal Pierre Magnan, Les Romans de ma Provence, paru chez Denoël en 1996, et l'album consacré à l'œuvre du peintre naïf Serge Fiorio publié aux éditions Le Poivre d'Ane en 1992.

(3) Déjà dans les années 1970, la production de cartes en noir et blanc de Pierre Ricou avait ses aficionados, comme le signalait Louis Vollaire dans son article « La carte postale n'est pas un gadget » publié dans la revue Communications & Langages (1976, No 31, pp. 87-194) : « Nous mentionnerons simplement, à Forcalquier, Pierre Ricou, qui édite des vues en noir et blanc de sa région. Cela lui a permis de recevoir des correspondances internationales de ses acheteurs les plus enthousiastes ».

(4) Pierre Ricou. In memoriam, site Serge Fiorio 1911-2011, 8 octobre 2016.

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CARTE POSTALE 1

Abri pastoral - Chaîne de Lure. Carte postale de Pierre Ricou, 1983.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1983 sous le titre « Abri pastoral - Chaîne de Lure » et faisant partie de la série « Provence à découvrir – Collection 1983 ». Vue entourée d'un filet noir et d'une bordure blanche. Dim. 15 x 10,5 cm.

Elle représente un des « abris pastoraux » de la chaîne de Lure attribués à un certain berger Bernard, dont Pierre Coste décrit ainsi le mode opératoire : « Ainsi le berger Bernard, de Redortiers, qui jusque vers 1960 s’est construit sur les Fraches de la montagne de Lure une série étonnante d’abris individuels contre le vent et les orages, repérait les pierres les plus convenables, les glissait dans sa besace, les ramenait jusqu’à un tas voisin. Et quand le tas était devenu suffisant, il le transformait en petit espace couvert, juste assez grand pour s’y asseoir ou s’y coucher avec son chien. » (5).

L'édicule (6) se trouve sur une ligne de crête, d'où le berger peut surveiller ses ouailles paissant sur l'un ou l'autre versant. L'abri a bénéficié d'un matériau de choix – de grandes lauses calcaires bien plates, faciles à assembler – dont la plus longue fait office de linteau. Malgré l'absence de repère, on devine que l'entrée n'a qu'une faible élévation et que le berger devait se plier en deux pour pénétrer à l'intérieur. Sous la voûte d'encorbellement surbaissée, la seule position possible pour notre homme était d'être assis à même le sol. L'abri n'est plus de toute première fraîcheur : des pierres ont été hissées sur le toit de lauses, d'autres jonchent les abords et l'intérieur. Existe-t-il encore, quelque 35 ans après avoir été photographié par Pierre Ricou ?

(5) Pierre Coste, Pierre sèche en Provence, Les Alpes de lumière, No 89-90, 1er et 2e trim. 1985, pp. 3-60, p. 4.

(6) Nous avons décrit plus en détail cet édicule dans le numéro 50 de notre série « Cartes postales anciennes montrant des cabanes en pierre sèche » : Abri du berger Bernard aux Fraches du Contadour à Redortiers (montagne de Lure, Alpes-de-Haute-Provence, 2 octobre 2016.

 

Abri pastoral - Chaîne de Lure. Carte postale de Pierre Ricou, verso, 1983

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales, la partie de droite, la plus petite, étant à son tour divisée par un filet identique en une partie haute (pour les timbres) et en une partie basse (pour l'adresse).

 

CARTE POSTALE 2

Le Contras 04. Carte postale de Pierre Ricou, 1984.

Carte postale en couleur éditée en 1984 sous le titre « Le Contras 04 » dans le cadre de la série « Images de Provence – Collection 1984 ». Vue entourée d'un mince filet noir. Dim. 15 x 10,5 cm.

Elle représente le même abri que celui de la carte précédente mais assorti d'une localisation plus précise : le Contras, c'est-à-dire le sommet (1641 m) de la montagne de Lure.

L'abri est ici photographié depuis la gauche (par rapport à un observateur extérieur) et au tout début de la pente. Les défauts de l'édicule s'en trouvent accentués, en particulier son exiguïté et le déjètement du gouttereau aval. Le choix de la couleur plutôt que du noir et blanc s'explique sans doute par la désir chez l'auteur de montrer ce moment privilégié où les dernières lueurs du soleil couchant peignent en or le versant et l'abri.

 

Le Contras 04. Carte postale de Pierre Ricou, 1984, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales.

 

CARTE POSTALE 3

Le Contadour - 04 . carte postale de Pierre Ricou, non datée.

Carte postale en noir et blanc non datée, éditée sous le titre « Le Contadour - 04 » dans le cadre de la série « Haute Provence à découvrir ». Vue occupant les quatre cinquièmes de la hauteur de la carte. Dim. 15 x 10,5 cm.

Au-delà d'une cabane en pierre sèche à la morphologie disgracieuse, on aperçoit dans le lointain une colline piquetée de petites touffes noires qui sont autant de jeunes pins apparus depuis l'abandon de l'éstivage des ovins.

La photo utilisée pour cette carte postale a fait l'objet d'une envolée très appréciative affichée le 17 juin 2019 sur le site Serge Fiorio - 1911-2011 sous le titre « Pierre Ricou. Sur une photo du plateau des Frâches, au Contadour» :
« Ici aux Frâches du Contadour, par exemple, Pierre est là, présent – une fois de plus comme par pur hasard – au jour ainsi qu'à l'heure précise, essentielle, où, assortie de sa duveteuse escouade, une maternelle colombe de la Paix transhume en plein ciel, gigantesque, au-dessus d'une statique et très unique petite cabane de berger ; elle, depuis longtemps bâtie sur place patiemment, pierre à pierre, à pierres sèches, bouche béante à fleur de terre pour permettre à tout moment au pastre comme au passant d'y faire halte, s'y parer du chaud, du froid ; aussi bien s'y abriter tour à tour des vents, de la pluie, ou de l'orage en colère ».
Si, dans ce nuage qui occupe une bonne partie du ciel, on peut effectivement voir, par paréidolie, une gigantesque « colombe de la paix », on peut tout aussi bien imaginer une grosse soupière... 

Quant à la « petite cabane de berger », elle n'est pas si petite que cela puisqu'il s'agit d'un montage fait à partir d'un des abris du berger Bernard à l'arrière duquel le photographe a greffé un pan de maçonnerie et un bout de toiture de lauses pour rendre l'édicule plus volumineux. Nous connaissons bien cet abri, l'ayant photographié et dessiné en 1984 lors d'une randonnée conduite par Pierre Martel sur la montagne de Lure. On peut d'ailleurs voir, dans le livre Pierre Sèche de  l'ethnologue Pierre Coste, une photo de votre serviteur en train de prendre des mesures « dans la bouche béante ».

 

Le Contadour - 04 . carte postale de Pierre Ricou, non datée. verso.

Dos divisé en deux parties inégales mais sans filet noir de séparation. Avec les trois traits horizontaux parallèles prévus pour l'adresse du destinataire, la présentation est plus classique.

 

À titre de comparaison

Abri du berger Bernard, 1984. © Christian Lassure.

Cette photo, prise en 1984, permet de se faire une idée de la forme et de la taille réelles de l'abri du berger Bernard ayant servi au montage de la carte ci-dessus. Le spécialiste de maçonnerie à sec ne manquera pas de noter la présence d'un hiatus dans le côté de l'édifice : il s'agit de la chaîne d'angle d'une façade antérieure. © Christian Lassure.

 

Abri du berger Bernard, face avant, 1984. © Christian Lassure.

Vue de face de l'édifice. On note que le parement de la tête du  mur gauche est en train de se désolidariser du reste de la maçonnerie. © Christian Lassure.

 

CARTE POSTALE 4

Bergerie à arcs-diaphragmes. Carte postale de Pierre Ricou, 1977.

Carte postale noir et blanc faisant partie de la série « Provence à découvrir – Collection 1977 ». L'image n'occupe qu'une partie de la hauteur du recto (7) et est entourée d'un épais filet noir et d'une bordure blanche. Dim. 15 x 10,5 cm.

Au verso (7), la citation : « Arcs-boutants du ciel, sans mortier, sans colonnes : le toit brimait leur vraie nature », signée d'un énigmatique P. L.

La vue est celle de l'intérieur d'une bergerie en ruine au lieudit les Fraches du Contadour à Redortiers dans la montagne de Lure (Alpes-de-Haute-Provence) (8).

Les « arcs-boutants du ciel » de la citation sont, dans la langue des architectes, des arcs-diaphragmes dont la fonction est de porter la toiture. La contre-plongée accentue ici l'élan spectaculaire de ces arceaux encastrés à leur base dans les parois latérales. Leur maçonnerie n'est pas sèche, sans mortier : celui-ci a été délogé des interstices entre les lauses par le lessivage répété des eaux de pluie depuis l'enlèvement de la couverture ; intérieurement, du mortier est encore présent. Les arceaux supportaient les trois cours de pannes de la charpente portant la couverture de tuiles canal.

L'intérêt d'avoir une succession d'arceaux dans une bergerie plutôt qu'une file de colonnes médianes est de dégager totalement l'espace intérieur.

(7) Nous entendons par « recto » le côté non illustré de la carte postale et par « verso » le côté illustré.

(8) Sur cette bergerie, voir Christian Lassure, Bergerie aux Fraches du Contadour à Redortiers (montagne de Lure, Alpes-de-Haute-Provence), pierreseche.com, 18 novembre 2002.

 

Bergerie à arcs-diaphragmes. Carte postale de Pierre Ricou, 1977, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales.

 

CARTE POSTALE 5

Bergerie à arcs-diaphragmes. Carte postale en couleur de Pierre Ricou, 1985.

Pierre Ricou a rephotographié les arcs-diaphragmes en 1985 mais cette fois-ci en couleur et en tournant le dos à la paroi du fond de façon à avoir les quatre arches dans son champ de vision.

Les herbes hautes de la belle saison ont envahi l'intérieur de la ruine si bien que le tiers inférieur des arches et des murs latéraux est caché à la vue. La première arche, prise en contre-plongée, est quelque peu aplatie. On remarque la disparition du cours latéral de pannes encore visible dans la carte de 1970.

N'ayant pu nous procurer un exemplaire de cette carte, nous ne pouvons rien dire quant au verso.

 

CARTE POSTALE 6

Grand cabanon pointu de Mane (Alpes-de-Haute-Provence). Carte postale de Pierre Ricou, 1970.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1970 sous le titre « Bories de Haute-Provence » dans le cadre de la série « Provence à découvrir - Collection 1970 ». Dim. 15 x 10,5 cm.

Le lieu ni le nom de cette impressionante cabane ne sont indiqués mais d'après sa taille et sa morphologie il s'agit du grand cabanon pointu des Eyroussiers à Mane (Alpes-de-Haute-Provence), dont le diamètre et la circonférence intérieurs sont respectivement 6 m et 18,85 m pour une hauteur sous voûte de 5,80 m (9).

Plutôt que de centrer sa composition classiquement sur le bâtiment, le photographe a disposé, sur un même axe oblique et de droite à gauche, trois éléments du paysage : un tronc d'arbre au premier plan, le grand cabanon au second plan, et la colline de Forcalquier dans le lointain. Si l'amateur de cabanes en pierre sèche ne sera guère ému à la vue du tronc à contre-jour, aux allures de totem, en revanche il ne manquera pas de noter la collerette formée par les lauses rectangulaires bien plates de la rive saillante de la toiture, l'incroyable marquetterie de lauses minuscules ayant servi à réaliser la couverture et, pour finir, le bloc de pierre plus ou moins circulaire trônant sur le faîte.

(9) Au sujet de cet édifice monumental, cf. Christian Lassure (texte), Dominique Repérant (photos), Le grand cabanon pointu des Eyroussiers à Mane (Alpes-de-Haute-Provence), site pierreseche.com, 6 novembre 2006.

 

Grand cabanon pointu de Mane (Alpes-de-Haute-Provence). Carte postale de Pierre Ricou, 1970, verso.

Dos divisé par un filet en deux parties inégales, la partie de droite, la plus petite, étant à son tour divisée par un filet de même épaisseur en une partie haute (pour les timbres) et en une partie basse (pour l'adresse du destinataire). Dim. 15 x 10,5 cm.

 

CARTE POSTALE 7

Grand cabanon pointu de Mane (Alpes-de-Haute-Provence). Carte postale en couleur de Pierre Ricou, 1985.

Pierre Ricou est retourné voir le grand cabanon en 1985. Cette fois-ci, l'édifice est photographié depuis l'aval et de trois quarts, ce qui nous vaut une vue de l'entrée et de son linteau d'origine, avant le remplacement de ce dernier par un rondin. Comme dans la photo en noir et blanc, l'édifice n'est pas centré : le photographe a laissé une place aux feuillages en amont éclairés par les lueurs dorées du soleil couchant.

N'ayant pu nous procurer un exemplaire de cette carte, nous ne pouvons rien dire quant au verso.

 

CARTE POSTALE 8a

Voûte d'une bergerie en pierre sèche à L'Hospitalet dans les Alpes-de-Haute-Provence. Carte postale de Pierre Ricou, 1973.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1973 dans le cadre de la série« Provence à découvrir - Collection 1973 ». Aucun titre ni descriptif n'est fourni. Dim. 15 x 10,5 cm.

La vue représente l'intérieur et le fond d'une ancienne bergerie en pierre sèche, située dans la plaine des Clapiers à L'Hospitalet dans les Alpes-de-Haute-Provence. Ayant eu l'occasion de faire la descripton d'une bergerie similaire il y a quelques années, nous en reprenons ici les principaux éléments (10).

On a affaire à une belle nef, à la voûte en berceau brisé dont le profil est à mi-chemin entre l'arc en plein cintre et l'ogive. Les corniches, le long desquelles a été déplacé le cintre, sont visibles de chaque côté. En dessous de chacune d'elles, la paroi est non pas droite mais légèrement oblique, donnant l'impression d'une courbe continue depuis la base jusqu'au faîte. Les murs porteurs sont en pierres calcaires ébauchées au marteau. La bande noirâtre qui court le long des murs latéraux et du fond n'est autre que le suint des moutons. Le pignon arrière est plein, à l'exception d'un fenestron percé dans le haut du triangle. Sur ce « tunnel » de pierre sèche repose une toiture à deux versants, couverte de minces lauses.

(10) Christian Lassure (texte), Jean Laffitte (photos), Bergerie de 1889 à Saumane (Alpes-de-Haute-Provence), site pierreseche.chez-alice.fr, 6 avril 2012

 

Voûte d'une bergerie en pierre sèche à L'Hospitalet dans les Alpes-de-Haute-Provence. Carte postale de Pierre Ricou, 1973, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales, la partie de droite, la plus petite, étant à son tour divisée par un filet moins épais en une partie haute (pour les timbres) et en une partie basse (pour l'adresse du destinataire).

Les « ciels de pierre » de la citation sont les impressionnantes files bien serrées de lauses se contrebutant les unes les autres dans la partie haute du voûtement.

 

CARTE POSTALE 8b

Voûte d'une bergerie en pierre sèche à L'Hospitalet dans les Alpes-de-Haute-Provence. Carte postale de Pierre Ricou, 1973 (variante).

Autre édition présentant quelques différences notables : la vue n'occupe plus que les trois quarts supérieurs de la carte et a été recentrée sur le mur du fond de la bergerie de façon à ce que les côtés de celle-ci soient symétriquement opposés. Dim. 15 x 10,5 cm.

 

CARTE POSTALE 9

Cheminée. Carte postale de Pierre Ricou, 1972.

Carte postale en noir et blanc intitulée « Cheminée de Borie » et faisant partie de la série « Provence à découvrir - Collection 1972 ». Cette « cheminée » n'est pas localisée. Dim. 15 x 10,5 cm.

Il semblerait qu'on ait là une vue en contre-plongée de la partie haute d'une voûte encorbellée sous laquelle des visiteurs auraient fait du feu après désobturation du sommet.

 

Cheminée. Carte postale de Pierre Ricou, 1972, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales, la partie de droite, la plus petite, étant à son tour divisée par un filet moins épais en une partie haute (pour les timbres) et en une partie basse (pour l'adresse du destinataire).

 

CARTE POSTALE 10

« Linteau d'entrée d'une borie ». Carte postale de Pierre Ricou, non datée.

Carte postale en noir et blanc non datée, intitulée « Linteau d'entrée d'une borie » et  faisant partie de la série « Aspects de Haute Provence ». Dim. 15 x 10,5 cm.

Avec son linteau extérieur en bois légèrement arqué, sa rive de lauses en saillie, l'entrée ne peut être que celle d'une cabane en pierre sèche. Après enquête, il s'agit de l'un des cabanons pointus du quartier des Eyroussiers à Mane : Jean Laffitte a photographié cette cabane et son entrée vers 2000 (voir infra).

 

« Linteau d'entrée d'une borie ». Carte postale de Pierre Ricou, non datée, verso.

Dos divisé classique, avec partie droite réservée à l'adresse du destinataire et à l'affranchissement.

 

À titre de comparaison

Cabane des Eyroussiers à Mane, photographiée par Jean Laffitte vers 2000.

La même cabane des Eyroussiers à Mane, photographiée par Jean Laffitte vers 2000. On reconnaît bien la forme du linteau en bois. © CERAV

 

CARTE POSTALE 11

« Deux bories ». Carte postale de Pierre Ricou, 1972.

Carte postale en noir et blanc intitulée « Deux bories » et faisant partie de la série « Provence à découvrir - Collection 1972 ». Dim. 15 x 10,5 cm.

Ici encore, Pierre Ricou n'indique pas l'endroit où se dressent côte à côte ces deux cabanons à la toiture en forme de clochette. Il s'agit en fait du lieudit Beaudine à Forcalquier si l'on en croit une photographie prise par Jean Laffitte en 2004. Des pans de murs sont visibles devant le cabanon le plus en avant : serait-ce les restes d'une annexe rectangulaire non voûtée ? La couverture de lauses de la cabane au premier plan laisse voir des manques dus à des plaquettes qui ont glissé. Un impression d'abandon se dégage de cet ensemble photographié il y a près d'un demi-siècle, impression apparemment contredite par la citation au verso : « Chaque rayon de soleil les comble de l'éternelle jeunesse ».

 

« Deux bories ». Carte postale de Pierre Ricou, 1972, verso.

Dos divisé traditionnel, avec partie droite réservée à l'adresse du destinataire et à l'affranchissement.

 

À titre de comparaison

Cabanes accolées à Forcalquier photographiées par Jean Laffitte en 2004.

Les cabanes accolées du lieudit Beaudine à Forcalquier photographiées par Jean Laffitte en 2004. © CERAV

 

CARTE POSTALE 12

« Borie du Lubéron ». Carte postale de Pierre Ricou, 1974.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1974 sous le titre « Borie du Lubéron » dans le cadre de la série « Provence à découvrir – Collection 1974 ». Vue entourée d'un épais filet noir. Dim. 15 x 10,5 cm.

Aucune localisation de l'édifice n'est fournie mais il semble s'agir d'une cabane à couvrement pyramidal qui est située au lieudit Saint-Vincent à Apt (Vaucluse) (11).

Pour édifier cette pyramide élancée à quatre faces planes et à quatre besaces d'angle, il a fallu aux constructeurs non seulement des connaissances en maçonnerie à sec mais ausi un échafaudage (vraisemblablement intérieur) et des cordeaux pour obtenir une parfaite rectilinéarité. L'entrée est couverte d'un arc surbaissé de lauses qui implique le recours à un cintre en bois.

Apparemment, pour ce cliché, Pierre Ricou a attendu que trois petits nuages, passant comme par-dessus la pointe de la pyramide, fassent à celle-ci trois petits panaches blancs. Il use d'un artifice similaire dans la carte intitulée « Le Contadour - 04 » décrite plus haut et dans celle du mur en épis dans le Lubéron affichée plus bas.

La citation ornant le verso a de quoi laisser songeur : « Le but ? Mais la halte de tous les pharaons de garrigue – Eric Elgherabli ».

(11) Cf. Parc naturel régional du Luberon et Association pour la participation et l'action régionale (A.P.A.RE), Les cabanes en pierre sèche du Lubéron. Inventaire et mise en place d'un programme de sauvegarde et de découverte, rapport méthodologique No 4 : commune d'Apt (responsable de l'inventaire : Sylvie Detot), Avignon, octobre 1988, 75 feuillets + 1 carte, en part. fiche No 84 003 F13.

 

« Borie du Lubéron ». Carte postale de Pierre Ricou, 1974, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales.

 

CARTE POSTALE 13

« Village des Bories à Gordes (84) ». Carte postale de Pierre Ricou, 1981.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1981 sous le titre « Village des Bories à Gordes (84) », dans le cadre de la série « Provence à découvrir – Collection 1981 ». La carte appartient à un ensemble de vues minérales contrastées, aux bords soulignés par un épais filet noir et une bordure blanche. Dim. 15 x 10,5 cm.

Elle représente un des groupements de cabanes en pierre sèche du lieudit les Savournins Bas, devenu par la magie du verbe poétique de son découvreur et restaurateur Pierre Viala, le « Village des bories » (12), bien qu'étant non pas un « village » en soi mais un quartier éloigné de Gordes, appelé familièrement  « Les cabanes » par les habitants.

Au premier plan, sur la droite (par rapport à un observateur extérieur), se dresse, à l'entrée du groupement, un mur de clôture couronné d'un râteau de lauses. Sur la gauche, dans la partie inférieure, s'étale le socle rocheux mis à nu formant la courette ou « sol de maison » (selon le cadastre napoléonien) ayant servi d'aire à dépiquer le blé. De la maison en question, on ne voit que le rebord de l'escalier.extérieur. Dans la partie supérieure, se dresse un sous-groupe formé d'un four et de son fournil, d'un fouloir et de sa cuve à vin, et d'une grange-magnanerie.

Le photographe a vraisemblablement vu l'effet visuel pouvant être obtenu en disposant selon un axe oblique : mur à l'entrée, courette et amoncellement de cabanes. Ne dirait-on pas que le mur monte la garde ?

(12) Sur le sujet, cf. Christian Lassure, « Les Cabanes » ou « Les Savournins bas » – alias Le « Village des bories » – à Gordes, en Vaucluse, 3e partie, Les divers groupes, site pierreseche.com, 24 janvier 2004.

 

« Village des Bories à Gordes (84) ». Carte postale de Pierre Ricou, 1981, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales.

 

À titre de comparaison

« Village de bories ». carte postale en couleur des années 1970.

Cette carte postale en couleur figure le même groupe de bâtiments et le même point de vue que la carte en noir et blanc précédente mais une dizaine d'années plus tôt : l'exemple en notre possession a en effet voyagé le 4 mai 1972. L'ensemble architectural porte les stigmates de l'abandon et du vandalisme. Si l'on compare la tête de mur de 1972 à celle de 1981, on constate que cette dernière a été remontée tout en gardant la structure originelle.

Le verso porte la légende suivante : « EN VAUCLUSE / Environs de GORDES (84) / Le village de bories ».

 

CARTE POSTALE 14

« Grande borie du Lubéron » à Gordes. Carte postale de Pierre Ricou, 1982.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1982 sous le titre « Grande borie du Lubéron » dans la série « Provence à découvrir – Collection 1982 ». Le lieu exact n'est pas indiqué mais il s'agit de Gordes d'après la notice du bâtiment dans la base Mérimée du ministère de la culture (Référence : AP60L05737). Dim. 15 x 10,5 cm.

Le bâtiment photographié est une grange-grenier de plan rectangulaire, formée de quatre murs encorbellés – deux longs (les gouttereaux) et deux courts (les pignons) – opposés deux à deux. Cette grange en forme de nef appartient à un type architectural et fonctionnel dont l'aire de diffusion est la région de Gordes (Vaucluse). Elle est signalée pour la première fois par le vicomte de Sartiges dans son article « Les cabanes en pierres sèches du sud de la France » paru en1921 (13) : « Entre Gordes et Sennanques (sic). Cabane en pierres sèches avec deux contreforts sur la face de la porte. Hauteur : 7 mètres ; longueur : 12 mètres ; largeur : 5 m 60 » (mesures extérieures apparemment).

Pierre Ricou a pris soin d'inclure dans son champ de vision les anciennes parcelles délimitées par des murets de pierre sèche censés marquer les limites des parcelles et protéger les cultures de la dent des ovins.

On retrouve le bâtiment, en noir et blanc ou en couleur, chez divers éditeurs de cartes postales dans la seconde moitié du XXe siècle.

(13) (de) Sartiges (vicomte), Les cabanes en pierre sèche du sud de la France, Bulletin de la Société préhistorique française, t. 17, 1921, No 12, décembre, pp. 338-358.

 

« Grande borie du Lubéron » à Gordes. Carte postale de Pierre Ricou, 1982, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales.

 

À titre de comparaison

Carte postale en noir et blanc des années 1950 (bords denticulés) représentant la même grange en pierre sèche que celle photographiée par Pierre Ricou quelque trente ans plus tard.

Le photographe de 1950, ignorant la fonction agricole du bâtiment, a mis en scène, dans la parcelle en friche, une jeune bergère en tenue provençale et une chèvre (ce qui sous-entend qu'on a affaire à un édifice pastoral).

 

CARTE POSTALE 15

Combes de Lure. Carte postale en couleur de Pierre Ricou, 1985.

Carte postale en couleur éditée en 1985 dans la série « Images de Provence - Collection 1985 ». La vue est entourée d'un filet noir et d'une bordure blanche. Dim. 15 x 10,5 cm. Au dos est inscrit : « "Il y avait un beau silence"(Jean Giono) (Combes de Lure) ».

La photo semble avoir été prise sur un versant de la montagne de Lure, en plein hiver ou au début du printemps à en juger d'après la neige déposée dans le creux de l'amoncellement de lauses au premier plan. Dans l'angle inférieur gauche, on distingue un bout de parement en maçonnerie sèche, indice d'une structure en pierre sèche. Dans le silence de ces vastes solitudes, ces lauses jetées en vrac sur une toiture témoignent du passage de randonneurs.

Sans cet énigmatique chaos de pierres au premier plan, la photo d'un versant proche et de crêtes lointaines n'aurait guère d'attrait et d'intérêt.

 

Combes de Lure. Carte postale en couleur de Pierre Ricou, 1985, verso.

Dos divisé par un épais filet en deux parties inégales.

 

CARTE POSTALE 16

« Mur en épis dans le Lubéron ». Carte postale de Pierre Ricou, 1990.

Carte postale en couleur éditée en 1990 sous le titre « Mur en épis dans le Lubéron » dans le cadre d'un collection dénommée simplement « Provence ». Le lieu précis n'est pas indiqué mais les spécialistes savent que ce pan de mur de soutènement à l'appareil en chevrons se trouve au lieudit Les Fondons à Saignon (Vaucluse) (14). Dim. 15 x 10,5 cm.

Son parement exhibe, de bas en haut, une semelle de gros blocs (non visibles sur la photo), trois rangées de moellons en chevrons ou épis, une première arase de lauses, une deuxième arase de gros blocs bien plats et enfin une rangée sommitale de moellons plantés bien droits comme des « i ». La réalisation d'une portion de mur en assises de chevrons suppose la collecte de moellons ayant plus ou moins la même largeur et la même épaisseur et pouvant être taillés facilement.

Pierre Ricou a choisi de montrer le hiatus entre la partie en chevrons et la partie en assises horizontales du mur. Il a aussi attendu le moment opportun pour saisir le passage d'un nuage dans le ciel au-dessus du pan de mur.

(14) On trouvera une description de ce pan de mur à la page 75 de notre livre Cabanes en pierre sèche de France, paru chez Edisud en 2004.

 

« Mur en épis dans le Lubéron ». Carte postale de Pierre Ricou, 1990, verso.

Le verso n'est plus divisé par un gros filet vertical et il n'y a plus de citation poétique. Le nom du photographe s"inscrit, en grandes lettres et dans une police de fantaisie tout en haut de la carte et au-dessus d'un filet horizontal.

 

À titre de comparaison

Photographie de Jean Laffitte (2002). © CERAV

Photographie de Jean Laffitte (2002). © CERAV

 

Conclusion

Si pour la collecte des cartes postales éditées par Pierre Ricou, nous avons bénéficié des facilités de recherche et d'acquisition offertes par le site cartophilique belge Delcampe, nous ne sommes pas sûr toutefois d'avoir répertorié toutes celles en rapport avec les vestiges architecturaux en pierre sèche de la région de prédilection du photographe. De nouvelles trouvailles peuvent survenir et permettre de compléter le présent panorama.

Les cartes de Pierre Ricou ne sont pas sans rappeler, par leurs thèmes, celles du photographe « cartepostalier » de Chalon-sur-Saône, Claude Fagé, qui, dans les années 1980 et 1990, édita en cartes postales ses propres photos noir et blanc. Ses thèmes de prédilection étaient les métiers en voie de disparition ou insolites, le spectacle des foires et marchés, les bâtiments à l'abandon, les vieilles entrées et fenêtres (15), etc. On lui doit même une série de six cartes postales sur le travail du « lavier » ou couvreur de toits de lauses.

Carte postale en noir et blanc éditée en 1984 par Claude Fagé. Elle  représente l'embrasure intérieure d'une fenêtre de la nef de l'église de Saint-Clément-sur-Guye en Saône-et-Loire (photographie prise en 1980).

 

La carte a pour nom « Espoir 1980 ». Un tampon surajouté, représentant le dos miniature d'une carte postale, contient le nom et les coordonnées de l'auteur et l'indication du numéro de la carte (21) sur un tirage de 100.

Chez Fagé comme chez Ricou, on préfère le noir et blanc à la couleur, la recherche esthétique à la facilité commerciale. La carte postale est vue comme un des moyens d'expression du photographe et un des supports privilégiés de son art.

(15) Cf. Christian Lassure et Georges Fouchet, Saint-Clément-sur-Guye (Saône-et-Loire) à travers les cartes postales anciennes, pierreseche.com, 13 avril 2018 (figures 22, 23 et 24).


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© Christian Lassure
30 janvier 2021 / January 30th, 2021

Référence à citer / To be referenced as :

Christian Lassure
Un photographe de l'architecture en pierre sèche de Provence : Pierre Ricou (A photographer of Provence's dry stone architecture: Pierre Ricou)
http://pierreseche.chez-alice.fr/cartes_postales_pierre_ricou.htm
30 janvier 2021

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